Un amuse-gueule, une vespasienne et le cycle de Doha
1. Amuse-gueule
Les semaines passent et ne se ressemblent pas.
Chaque semaine, je passe un ou deux entretiens d’embauche.
Vous vous rappelez que je vais certainement changer de job.
Depuis ce temps là, je sors moins sur les blogs. Très peu même.
M’enfermer sur moi. Ou plutôt me ressourcer. Me retrouver.
Garder un pied-à-terre dans la mondoblogosphère.
Quelques notes par ci, par là. Comme aujourd’hui.
Le besoin de partager. Toujours et encore partager.
J’aime ce mot : Partager.
Ben voilà, maintenant ça s’accélère.
Et ça me prend un temps dingue.
Ces entretiens d’embauche sont comme une forme d’amuse gueule au sens littéral.
Montrer sa gueule sous le meilleur jour, jouer un rôle, prétendre qu’on est l’homme [forcément] de la situation et que forcément ce job là, il est pour moi !
C’est plutôt marrant.
Et vous verriez la gueule que je tire : bien sous tous rapports, le sourire, la décontraction, la confiance en soi et le discours bien rodé…
C’est pour toutes ces raisons que j’ai envie d’intituler ce paragraphe « Amuse-gueule ».
2. Réflexion vespasienne
Non, le paragraphe qui suit n’a décidément rien à voir avec une réflexion de WC public.
Au premier âge de la civilisation chrétienne, un homme inventa un système permettant de soulever des poids importants sans peine.
Surtout il rendait le travail moins pénible à ces personnes qui travaillaient durement. Qui plus est, il réduisait également le nombre de personnes nécessaires pour manipuler un poids équivalent.
L’empereur romain Vespasien aurait alors dit ceci envers cet homme, géniteur de cette prouesse technique:
« Tu as bien travaillé. Mais ta machine doit être détruite. Je ne veux pas jeter dans la misère tout un peuple de porteurs qui se verraient privés par là leur gagne-pain. »
Que penser de cette réflexion à l’aube de la conférence de Hong Kong, ouverte dans le cadre du cycle de Doha au sein de l’OMC ?
3. La mondialisation en plat principal : des aberrations mais tout n’est pas si simple
Je n’avais rien compris au cycle de Doha.
Depuis quelques jours, je commence à saisir l’enjeu, les vrais enjeux devrais-je dire.
C’est simple [je schématise un peu pour la bonne cause] et éminemment complexe à la fois.
Les Etats-Unis, l’Europe subventionnent considérablement leur agriculture.
Le Brésil a une main d’œuvre éminemment bon marché [voire, a aussi recours à l’esclavagisme].
L’Europe protège encore certains de ses marchés [sucre, etc] pour protéger ses emplois.Grâce à tout cela, les grosses industries agro-alimentaires occidentales inondent les pays en voie de développement en faisant semblant d’être compétitives.
Ce sont eux, ces multinationales, qui s’enrichissent de la mondialisation.
Ce sont eux qui veulent libéraliser le marché à outrance.
En même temps, ces industries permettent d’avoir des produits à bas prix sur les marchés des pays « pauvres » [quitte à recourir au « progrès » technique des OGM].
Nous mêmes, en France, nous achetons ces produits mondialisés. Ne serait-ce que des fleurs qui viennent en France par avion d’Amérique Latine. Moins chers que ces superbes roses rouges que j’offrais à douce Marie [« Madame Delbard »] quand on était étudiants dans le Quartier Latin.
De l’autre côté, les pays en voie de développement ne peuvent pas vendre au prix du marché mondial car le cours est trop faible par rapport à leur coût de revient [énorme vu leur petites structures]. Même sur leur propre territoire. Ils veulent donc une protection tarifaire sous forme de droits de douanes.
Par exemple, le sucre [dont le prix est inchangé depuis 1993] est garanti aux fabricants européens à un cours de 632 Euros/T. Rien que trois fois le cours mondial du sucre. L’Europe en fait bénéficier des pays de l’ACP [Afrique-Caraïbes-Pacifique] en leur rachetant du sucre à ce cours là. Sympa comme geste de solidarité mondiale. Mais c’est aussi une forme d’acharnement thérapeutico-économique alors que ces industries sont en phase terminale. Plus dure sera la chute. Avec à la clé la perte de 20.000 emplois industriels d’ici quelques années, lorsque ce protectionnisme aura cessé. En faveur du Brésil et son canne à sucre. Et l’ACP perdra brutalement, violemment sa manne de devises.
De façon générale, si on baisse les subventions agricoles en France, c’est toute une industrie paysanne qu’on pousse au bord du suicide social. Mais en attendant, ce sont les paysans « pauvres » des pays en voie de développement qui sont en train de crever ou du moins de ne pas se développer. On s’étonne qu’il se déroule alors des drames style Médina aux portes de l’Europe.
Seuls les plus gros et les plus forts ont leur mot à dire dans notre monde de brutes. C’est comme ça. Il faut juste le savoir.
Mais ce repli vers un protectionnisme économique n’est pas souhaitable. Il empêche l’adaptation des sociétés et des économies à des nouvelles donnes qui sont irréversibles. Sauf à dire à la Chine qu’il faut qu’elle arrête de produire des T-shirts pas chers et que les occidentaux arrêtent de vouloir les acheter à moins de 10 Euros. Nous sommes nous-mêmes par nos comportements d’achats les acteurs de cette mondialisation, de cette violence morale de par le monde.
Saviez-vous que la Chine elle-même craint maintenant que ses industries textiles soient à leur tour délocalisé dans d’autres zones moins chers en main d’œuvre en Asie ?
Mais c’est là que je boucle sur un leitmotiv personnel : de la responsabilité des hommes politiques à nous gouverner, à préparer notre société à ces changements profonds qui sont … prévisibles. Combien d’années par avance a-t-on su que le marché textile allait être ouvert à la concurrence ? Guillaume Sarkosy [à la tête de sa fédération de l’industrie textile] me fait bien rigoler à pleurnicher. Il a raison de dire que c’est un drame social pour l’industrie textile française. Mais son frère Nicolas, il aurait pu dire à ses copains de l’UMP [Chirac en premier] qu’il fallait mettre en place des filière de reconversion industrielle, mieux adapter la formation des bacs pros au besoin futur [vous savez, la gestion prévisionnelle des compétences ?]. Et puis on parle même pas des socialistes non plus qui n’ont pas été tellement meilleurs au gouvernement.
De toute façon, ils s’en foutent tous. Ce qui les intéresse, c’est leur élection à eux. Si ce sera untel ou unetelle qui sera choisi(e) après les primaires, à droite ou à gauche. Quant aux gros chantiers de fond, personne n’y mettra la main à la patte.
Bref, le politique est responsable.
Le politique est coupable.
Même dans son inaction.
Be cool, be open.
UU
ps : Y a encore des débats au sein du jUUry quant au lauréat du Grand concours 2005 des meilleurs mots lus… ;o) Fin de délibération d’ici quelques jours… ;o)
[crédit : Merci Fred pour la photo sur les subventions !]
Mon Cher UU,
Tu as raison sur presque toute la ligne…Sauf à la fin!
Ce ne sont pas les politiques qui sont responsables mais les peuples. Effectivement en première analyse on pourrait considérer que les responsables politiques devraient « anticiper ». Encore faudrait-il qu’ils soient suivis par les peuples. Un politique qui aujourd’hui voudrait anticiper sur les vrais enjeux battu! Et donc dans l’impossibilité de mener une quelconque action.Je parle bien sûr dans le cadre de régimes démocratiques. Des hommes d’Etat comme de Gaulle, Mendès France, Raymond Barre, Michel Rocard (comme dirait Julliard), j’ajouterais Jacques Delors…Ont eu les pires rapport avec le suffrage universel, ou bien ont été accusé de « Bonapartite »…
A mon humble échelle j’ai été amené à participer à de nombreuses campagnes, pas toujours en première ligne et je souffrais de cette difficulté à aborder les sujets qui fâchent que je ressentais de la part des tête de liste ou des candidats divers et variés. Un jour j’ai été moi-même en responsabilité de mener la campagne. J’ai décidé de dire la vérité, de ne pas cacher les difficultés, de montrer les vrais difficultés…J’ai été battu!Par ceux qui prométaient tout et n’importe quoi sans se soucier des possibilités réelles. C’est le plus démago intelligent qui gagne.Celui qui flatte le mieux, ça dure depuis Cicéron!
Désolé de te décevoir, mais tu te tropmpes la responsabilité c’est le peuple qui l’assume, pas les politiques.
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je voulais juste te dire qu’en écoutant « Gonzales » que j’ai fait découvrir à des amis ce week-end j’ai pensé à toi
à bientôt
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J’ai lu avec attention ta note. Mon entreprise a un representant à Hong Kong actuellement. Je vous en parlerai bientôt en peu plus en détail sur l ‘industrie du sucre dans un pays en voie de dévelopement.
Jlhuss : tu as eu raison de rajouter Delors à la liste … je vais choquer certains peut être, mais Lamy, aussi, fait partie de ces socialistes « honnêtes hommes » à mon humble avis (qui est fréquement en contradiction avec Lamy !)
Et puis … on a assez des délibérations du Blogoncourt ! Vous avez trop mangé ? Vous faites toujours la sieste ? Qui a gagné ? Le monde est suspendu à vos lèvres !
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Jlhuss : Le peuple ,il a bon dos. Il choisit rien. ça fait des lustres et des lustres qu’il s’est établi une aristocratie politique très « club Fils-de » qui n’est pas près de s’éteindre. Pour qui votons nous ? Pour ceux qui se présentent? Qui se présente ? Ceux que nous avons choisis ? Ttttt allons allons : les candidats on nous les candidate les antidate les postdate : nous reste plus qu’à les oblitérer à dates fixes.
Nos élections ( comme nos – quand il y en a dans les partis – « primaires » et autres investitures ) sont bananières. De ce côté là nous n’avons jamais fait l’économie d’un régime.
Cicéron ou pas, Jlhuss : le grand père ou l’arrière grand père du peuple est très certainement responsable d’avoir mis en place cette aristocratie . Mais est on responsable ad vitam aeternam de la naïveté politique de nos grands parents ?
Entre temps ce sont ces aristos qui nous gouvernent. Ce sont eux qui ont le pouvoir. Et se comportent trop souvent en irresponsables : normal, me diras tu « puisqu’ils ne sont pas responsables ». Puisque les responsables : c’est nous.
La femme dit :
– c’est pas moi, c’est la pomme
La pomme dit :
– c’est pas moi, c’est l’arbre
L’arbre dit:
– c’est pas moi, c’est le serpent
Le serpent dit:
– c’est pas moi c’est le Créateur
Le Créateur dit:
– c’est pas moi c’est la femme.
Tous des menteurs ?
amications papiébybles
dB
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Et Adam là dedans ?
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Jlhuss>> Disons que nous sommes proches de la même frontière. Mais juste de part et d’autre.
J’ai écrit volontairement que « nous sommes nous-mêmes par nos comportements d’achats les acteurs de cette mondialisation, de cette violence morale de par le monde. »
Donc le peuple lui-même a sa part de responsabilité.
Mais ce peuple souverain a besoin d’un électro-choc. Il peut venir du monde associatif. Il peut aussi venir du politique.
J’ai en effet parlé d’hommes politiques dans la fin de la note. Mais nuance subtile, j’accuse « le » politique à la toute fin de la note. La « chose » politique en somme. C’est dire d’une certaine façon que le débat politique n’est pas assez riche et profond sur ce sujet.
Prenons l’exemple de l’école. L’élève en situation d’échec [par exemple pour cause de banlieue difficile, d’environnement familial inexistant, etc.] peut être « sauvé » par un professeur pédagogue, attentionné, puis une République qui lui octroiera une bourse.
Idem pour la société française. On a besoin de pédagogie. Qu’on nous explique les choses. Et pour cela, il faut des hommes politiques charismatique, courageux, passionnés et pédagogues si on veut éduquer une majorité.
Mais peut-être ne sont-ils pas assez nombreux ceux-là. Ton initiative a été courageuse, Jlhuss. Elle a été malheureusement isolée. Car la démagogie politique est trop répandue actuellement.
D’où la prise de pouvoir citoyenne individuelle par les paysans coréens à Hong Kong par exemple.
Il y a une certaine dimension de ploutocratie ou d’aristocratie politique comme le dit di Brazza, en France.
Que faire finalement ? Tout n’est pas si simple, j’en conviens aisément…
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Elisanne>> héhé ;o) Tant mieux si tu as pu partager avec tes amis…
Guess Who>> Patience… ;o) Bon pour le sucre, tiens moi au courant. Comme je blogue moins ailleurs que chez… moi, je risquerais de rater ça.
di Brazza>> La pêche, à ce que je vois !…
J’aurais envie de dire que tu as autant raison que Jlhuss. C’est ce que j’écris plus haut. Nous citoyens devons changer de comportement, de vision du monde. Pour comprendre la mondialisation. Et d’un autre côté, les hommes politiques doivent nous accompagner. Même si on passe le cap Horn ensemble. Le problème est que la démagogie fait rebrousser chemin à nombre d’hommes politiques qui pensent à flatter l’électeur, animal pulsionnel.
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Nous vivons en Allemagne un exemple flagrant. La droite et la gauche dirigent ensemble le pays. Officiellement, seule une grande coalition est à même de réformer l’Allemagne et la mettre sur les bons rails… en réalité, aucun ne voulait réellement se retrouver dans l’opposition. Ainsi, aucun ne pourra appliquer son programme de réforme, puisque, dans l’objectif de parvenir à un accord lors des négociations pour définir le programme d’action du gouvernement, chacun a dû abandonner les idées les plus fortes, celles qui pouvaient vraiment changer la donne. Une occasion manquée de plus et un surplace qui se prolonge dangereusement pendant que le reste du monde bouge et change !
Enfin, et c’est la cerise sur le gâteau, notre ami Schroeder vient de nous montrer à quel point les hommes politiques sont dévoués à leurs pays, sans se soucier de leur personne. Battu lors des élections, il est très vite allé se consoler au directoire de la société germano-russe de construction et d’exploitation du gazoduc sous-marin reliant la directement la Russie à l’Allemagne. Une réalisation qu’il a personnellement rendue possible par un accord signé 10 jours avant les élections de septembre en se mettant à dos la Pologne et les Pays Baltes privés de la manne financière d’un tel ouvrage. Quand on lui parle de conflit d’intérêt, il répond qu’il n’est plus chancelier et s’il a accepté ce poste c’est par altruisme, car il pourra défendre les intérêts allemands au sein de la structure…
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Au fait ca fait plaisir de te lire de nouveau… et bon courage pour tes entretiens, c’est un boulot à plein temps!
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‘tain, j’ai encore loupé le coche… je suis le 40018eme!!!
C’est pas possible, j’vais jamais y arriver…
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jmesuiléssépoucélacravat>> héhé ;o) J’y ai pensé ce matin en postant mon commentaire dessus, aux 40K visites… en tout cas, tu auras le mérite d’être le plus proche et de l’avoir signalé ! Merci de cette attention qui me touche sincèrement.
Pour le coup, je m’en vais demander au jUUry de te filer des points en plus pour le concours des meilleurs mots lus ! ;o)
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YES!!!!
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pour les points, faudra pas oublier de me faire un petit chèque ou bien de m’envoyer des bons du tresor, j’accepte aussi.
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Et les emprunts russes, tu prends???
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